mercredi 19 novembre 2008

Anne-Marie Ndzié : “J’ai patienté pour avoir ce que j’ai aujourd’hui ”


A 77 ans dont 60 dans la musique, la ‘Mémé’, comme elle aime se faire appeler, exprime sa reconnaissante pour la soirée hommage/gala que lui prépare le gouvernement La semaine prochaine.

6o ans de carrière, qu’est-ce qui a fait votre force ?

Je dirai d’abord que tout travail doit se faire avec amour. Il faut aimer ce que tu fais, et par la suite, Le Seigneur va t’ajouter de la joie pour le faire. J’ai aimé la musique et je l’aimerai jusqu’à la fin de mes jours. Je prends aussi beaucoup de temps pour écrire mes textes.

Je réfléchis beaucoup.


Parce qu’il faut toujours se demander dans quel sens vos paroles seront utiles au public qui va écouter votre musique. C’est un travail énorme.

Comment s’est passée votre entrée dans la musique ?

Je peux dire que je suis née pour chanter. Il y avait chez nous, à Bibia, un pasteur qui, un jour, a organisé un concours de chant que j’ai remporté. C’était à la mission protestante de Bibia et j’avais environ quinze ans. Je pense que c’est Dieu qui m’a donné ce don et permis de faire ce travail. C’est à partir de ce moment que mon esprit s’est véritablement ouvert à la musique. Entre temps, j’avais mon frère, Cromwell, qui était un grand guitariste et me demandait toujours de l’accompagner dans ses prestations. Parce qu’il trouvait que j’avais une belle voix. J’ai aimé et je m’y suis habituée. C’était après ma chute tragique d’un manguier qui venait de me faire passer quinze ans à l’hôpital.

Quels ont été vos principaux obstacles ?

Il y a beaucoup de jalousie dans le domaine de la musique. Mais, quand tu veux bien faire ton travail, il faut éviter de se préoccuper de tout ce qui peut te perturber. Il faut juste aimer ce que tu fais. Il faut également éviter d’aller chez les marabouts, parce que quand Dieu vous donne quelque chose, personne ne peut vous l’enlever. Alors, il faut savoir l’honorer. Voilà pourquoi j’ai aimé mon travail jusqu’aujourd’hui. Il faut aussi savoir que le verbe qui se conjugue au Cameroun c’est “ attendre ”. Si je n’avais pas été patiente, je n’aurai pas ce que j’ai actuellement. Chaque chose en son temps. Les jeunes doivent être patients, les choses vont s’arranger.

Vos plus grands souvenirs ?

C’est d’abord cet évènement que le président prépare pour moi. Quand un président de la République vous prépare quelque chose parce que vous avez bien travaillé, c’est un grand honneur. C’est quelque chose de grandiose. D’abord, il a construit la maison où j’habite et je ne sais pas ce qu’il me réserve par la suite. Donc, quand quelqu’un reconnaît le travail que vous avez fourni et décide de vous récompenser, je crois qu’il n’y a pas meilleure satisfaction. Je garde également un bon souvenir du parcours que j’ai fait jusqu’ici. J’ai été invité dans plusieurs pays en Chine, en Allemagne, dans des pays africains. J’ai aussi joué à l’Olympia, à Paris. Il faut noter que mon pays m’aime beaucoup et je l’aime aussi. Parce que, si j’étais comme la plupart de jeunes filles, je n’allais pas rester au Cameroun. Des gens me font des cadeaux partout où je vais. C’est ce grand amour manifesté en ma personne qui m’a encouragée à rester et à travailler chez moi. Et ce que j’ai gagné à travers ma musique est “ incomptable ”. Ma maison est pleine de cadeaux et ça ne va pas s’arrêter là. J’ai gagné de nombreux prix au Cameroun et ailleurs. Chevalier, ordre de la valeur parce qu’ils ont vu que leur maman travaille très bien, et je remercie le bon Dieu pour ça.

Votre avis sur le niveau actuel de la musique au Cameroun

Les débuts sont toujours difficiles. Je ne savais pas que j’allais un jour voir une de mes filles chanter. Parce que j’étais seule dans le domaine du bikutsi quand je commençais. Et ce n’était pas facile. A l’époque, on taxait tous ceux qui faisaient de la musique de voyous. Et pourtant, c’est un métier comme un autre. Je suis donc contente aujourd’hui de voir les jeunes filles faire de la bonne musique.

Et pensez-vous qu’elles vous représentent valablement ?

Je crois que oui. Je peux dire qu’elles sont encore jeunes, et quand on est jeune, on est instable. Quand elles vont prendre de l’âge, leur coeur voa s’adoucir et elles vont devenir un peu plus raisonnables. Je pense qu’elles chantent bien. Seulement, ce qui m’étonne c’est qu’elles mettent des habits qui sont très courts. Elles doivent apprendre à s’habiller décemment, parce que c’est aussi cela qui construit la personnalité d’une personne. Il y en a certains qui sont vantards mais ça ne regarde que eux-mêmes. Car, faire ce métier, c’est apprendre à être le plus humble possible. Et c’est ce que je leur recommande. Parce que c’est ce manque d’humilité qui les amène chez les marabouts et dans les secteurs. C’est pour cela que certains meurent tôt, parce que ce n’est pas tout le monde qui fête 60 ans de carrière.

Qu’attendez-vous du public la semaine prochaine ?

C’est mon public et il sait ce que j’attends de lui. Ils savent que leur maman a beaucoup travaillé et aussi ce que je mérite. Je souhaite déjà qu’il soit là, nombreux, je sais qu’on va passer un bon moment. La preuve, je n’ai personnellement pas conçu, mais j’ai beaucoup d’enfants de mes frères et sœurs que j’ai élevés. Tous les Camerounais sont mes enfants. L’un d’entre eux ne peut pas accepter qu’on me fasse du mal en route.

Doit-on encore attendre de nouveaux titres de la Mémé ?

Quand je ne suis pas au Centre culturel camerounais où je travaille à l’orchestre national, je compose mes chansons. Je ne peux pas rester sans le faire. Il m’est difficile de dormir pendant la journée. J’ai déjà composé sept morceaux pour mon prochain album. Je vais encore composer trois autres pour que ce soit dix morceaux, puis je vais enregistrer. Je vais beaucoup surprendre le public qui me croit déjà trop fatiguée et à court d’inspiration.

Écrit par Pélagie Ng’onana

http://www.lanouvelleexpression.info

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