jeudi 15 janvier 2009
Bafoussam : Le peuple Fussep au cœur du Nyang-Nyang
Les festivités marquant le Nekieng 2008-2009 ont commencé depuis le 28 novembre 2008 et connaîtront l’apothéose le 8 mars 2009.
Samedi 03 janvier 2009. Il est 15 heures. Sous un temps ensoleillé, des foules se mobilisent, à grand pas, vers la place des fêtes de la chefferie Bafoussam. Personne ne veut rater une seule seconde de la grande danse Packme’edjouong qui y sera exécutée. Pas moyen de se frayer un passage au milieu de près de 3000 âmes. Cameramen, photographes et autres reporters sont là pour immortaliser les différentes scènes. Au milieu de l’esplanade, on peut voir un groupe de jeunes batteurs de tam-tams. Ils ont le torse nu, avec des pantalons ou pagnes arborés. Le corps est embaumé d’huiles, avec des tiges d’herbes nouées autour de la tête. C’est la marque distinctive des initiés au Nyang-Nyang, une danse ancestrale qui dure depuis plus de huit siècles. La danse Packme’edjoung, l’une des étapes les plus importantes du festival, est personnellement conduite par le gardien de la tradition, sa majesté Njitack Ngompé Pelé. Il est entouré des différentes sociétés secrètes et autres notables de la chefferie Bafoussam. La moyenne d’âge des danseurs est d’au moins 40 ans.
Chaque danseur a le torse nu coloré, avec un collier au cou, un pagne traditionnel autour des reins et des défenses d’animaux entre les mains. Tout cela traduit la puissance et la victoire du peuple Fussep face à l’assaut des ennemis pendant les années d’indépendance qui ont été marquées par des guerres de tranchées, parfois sanglantes, entre les groupements. Une large feuille d’herbe est tenue sur le crâne par une ficelle. Pendant que certains dansent à visage découvert, d’autres par contre portent un chapeau à plumes ou des masques. Seul le chef a le corps entièrement couvert et est protégé contre le soleil par un parasol que tient l’un de ses tchinda (serviteurs). Le corps des danseurs vibre au rythme de la musique distillée par les tam-tams. Les pas de danse sont alléchants et arrachent au passage des salves d’applaudissements. Parmi les spectateurs, d’aucuns admirent les jeux de reins endiablés et parfois la virilité du chef qui est appelé à danser pendant plus d’une heure. Avec quelques minutes de pause par endroit. Après un tour complet, il salue ses invités et se retire de la scène. C’est du haut de la tribune, au milieu de ses hôtes de marque, au rang desquels les autorités administratives, traditionnelles et religieuses, qu’il assiste à la fin de la danse. Malgré le poids de l’âge, les danseurs sont déterminés à montrer leur attachement à leur culture en allant au bout de près de deux heures de danse.
Valeurs ancestrales
Pendant toute la période d’initiation au Nyang-Nyang encore appelé le passage de la terre, les jeunes initiés (garçons âgés entre 7 et 15 ans) sont appelés à sortir par vague, après chaque huit jours, pour danser sur la place du marché. Signe de leur admission dans la société au rang de dignitaires et vaillants soldats. La place des fêtes de la chefferie et les concessions de certains sous-chefs ou grands notables sont les différents sites d’initiation où les futurs porte étendards de la tradition et de la culture Bafoussam se frottent à certains enseignements relatives aux moeurs et autres sociétés secrètes. A en croire sa Majesté Njitack Ngompé Pelé, c’est dans la tranche de 7 à 15 ans que les jeunes sont sensés porter les germes de leur culture, la défendre et la véhiculer partout où ils vont.
C’est la raison pour laquelle les jeunes initiés doivent marcher à travers les artères de la ville avec le corps embaumé de terre. Certains déviants se permettent parfois de faire usage d’huile moteur ou de la peinture. Une pratique qui va à l’encontre des objectifs visés par le rite initiatique et est condamnée par le chef qui appelle à un retour effectif et définitif aux racines culturelles du peuple Fussep. “C’est un passage obligé pour tout jeune Bafoussam qui n’aimerait pas faire partie du clan des auto exclus, des parias ou des fainéants de sa génération”, argue le chef Njitack qui vient de célébrer, avec succès, ses 20 ans de trône. Au-delà de l’attachement des Fussep à leurs valeurs ancestrales qui ont pu survivre à la modernité qui frappe jusqu’aux portes de la chefferie, le festival biennal Nyang-Nyang est une grande ouverture vers la découverte des différentes richesses touristiques et artistiques que regorge ce groupement.
Écrit par Blaise Nzupiap Nwafo
http://lanouvelleexpression.info
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